Page:Loti - Mon frère Yves, 1893.djvu/360

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milieu du même grand cercle qui semblait éternellement se reformer, s’étendre et le suivre.

Quelquefois ce cercle était noir et dessinait nettement partout sa ligne inexorable qui s’arrêtait aux premières étoiles du ciel, ou bien l’immense contour était adouci par des vapeurs qui fondaient tout ensemble ; alors on se figurait courir dans une espèce de globe d’un bleu gris, très étoilé, dont on s’étonnait de ne jamais rencontrer les parois fuyantes.

L’étendue était remplie des bruits légers de l’eau, l’étendue était toujours bruissante à l’infini, mais d’une manière contenue et presque silencieuse ; elle rendait un son puissant et insaisissable, comme ferait un orchestre de milliers de cordes que les archets frôleraient à peine et avec grand mystère.

Par instants, les étoiles australes se mettaient à briller d’éclats très surprenants ; les grandes nébuleuses étincelaient comme une poussière de nacre, toutes les teintes de la nuit semblaient s’éclairer, par transparence, de lumières étranges, on se serait cru à ces moments des féeries où tout s’illumine pour quelque immense apothéose ; et on se disait :