Page:Loti - Mon frère Yves, 1893.djvu/385

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comme c’est la première fois de ma vie, je m’embrouille aussi.

À ce dîner, je mange pour leur faire plaisir ; mais ce bonheur si complet que je sens là près de moi et dont je suis un peu cause, cette reconnaissance si profonde qui m’entoure, tout cela m’impressionne très étrangement. Être au milieu de ces choses rares, cela me surprend comme une nouveauté délicieuse.

— Vous savez, me dit Yves, bas comme en confidence, maintenant je vais à la messe le dimanche avec elle.

Et il fait du côté de sa femme une petite grimace de soumission enfantine, très comique avec son air sérieux. D’ailleurs sa manière d’être avec Marie a tout à fait changé, et j’ai bien vu en entrant que l’amour était enfin venu s’installer pour tout de bon dans la maison neuve. Alors mes chers amis n’ont plus rien à attendre de meilleur sur terre ; comme Yves le dit, il faudrait seulement pouvoir arrêter la pendule du temps pour que cette grande joie de leurs rêves accomplis ne s’en aille plus.

Eux aussi sont silencieux dans leur bonheur,