Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/150

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bruit grinçant qu’elle connaissait bien, — pour lui donner passage !

Non, décidément, elle n’oserait jamais ; plutôt se consumer d’attente et mourir de chagrin, que tenter une chose pareille. Et déjà elle avait fait quelques pas pour retourner au fond de sa chambre, s’asseoir et travailler.

Mais elle s’arrêta encore, hésitante, effarée, se rappelant que c’était demain le départ pour l’Islande, et que cette occasion de le voir était unique. Il faudrait donc, si elle la manquait, recommencer des mois de solitude et d’attente, languir après son retour, perdre encore tout un été de sa vie…

En bas, la porte s’ouvrit : Yann sortait ! Brusquement résolue, elle descendit en courant l’escalier, et arriva tremblante se planter devant lui.

— Monsieur Yann, je voudrais vous parler, s’il vous plaît.

— À moi !… mademoiselle Gaud ?… dit-il en baissant la voix, portant la main à son chapeau.

Il la regardait d’un air sauvage, avec ses yeux vifs, la tête rejetée en arrière, l’expression dure, ayant même l’air de se demander si seulement il s’arrêterait. Un pied en avant, prêt à fuir, il pla-