Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/318

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

à présent — comme faisaient les autres, les habituées…

Elle n’avait jamais assisté de près à ces scènes, à ces adieux. Tout cela était nouveau et inconnu. Parmi ces femmes, elle n’avait point de pareille et se sentait isolée, différente ; son passé de demoiselle, qui subsistait malgré tout, la mettait à part.

Le temps était resté beau sur ce jour des séparations ; au large seulement une grosse houle lourde arrivait de l’ouest, annonçant du vent, et de loin on voyait la mer, qui attendait tout ce monde, briser dehors.

… Autour de Gaud, il y en avait d’autres qui étaient, comme elle, bien jolies et bien touchantes avec leurs yeux pleins de larmes ; il y en avait aussi de distraites et de rieuses, qui n’avaient pas de cœur ou qui pour le moment n’aimaient personne. Des vieilles, qui se sentaient menacées par la mort, pleuraient en quittant leurs fils ; des amants s’embrassaient longuement sur les lèvres, et on entendait des matelots gris chanter pour s’égayer, tandis que d’autres montaient à leur bord d’un air sombre, s’en allant comme à un calvaire.

Et il se passait des choses sauvages : des malheu-