Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/76

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enfant qui tourmente un jouet quelconque en pensant à autre chose ; après, les laissant encore retomber, elle se mit très vite à les défaire pour s’amuser, pour les étendre ; bientôt elle en fut couverte jusqu’aux reins, ayant l’air de quelque druidesse de forêt.

Et puis, le sommeil étant venu tout de même, malgré l’amour et malgré l’envie de pleurer, elle se jeta brusquement dans son lit, en se cachant la figure dans cette masse soyeuse de ses cheveux, qui était déployée à présent comme un voile…


Dans sa chaumière de Ploubazlanec, la grand’mère Moan, qui était, elle, sur l’autre versant plus noir de la vie, avait fini aussi par s’endormir, du sommeil glacé des vieillards, en songeant à son petit-fils et à la mort.

Et, à cette même heure, à bord de la Marie, — sur la mer Boréale qui était ce soir-là très remuante — Yann et Sylvestre, les deux désirés, se chantaient des chansons, tout en faisant gaîment leur pêche à la lumière sans fin du jour…