Page:Loti - Rapport sur les prix de vertu, 1898.djvu/35

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À Dieu ne plaise que j’aie l’air de dédaigner ces braves. Mais je fais à leur sujet mes restrictions, comme j’en ai fait tout à l’heure au sujet du Père Joseph. Dans les choses admirables, il y a des degrés comme en tout. À la faveur d’un élan superbe, secondé presque toujours par une impulsion de vigueur physique, on joue sa vie pour sauver celle d’un autre ; cela est beau, je le veux bien, et nous n’en serions pas tous capables ; mais cela n’est pas soutenu, cela n’a pas de durée. Oh ! combien je trouve plus difficiles et plus loin de moi — je puis bien dire plus loin de nous — ces sacrifices, accomplis avec un visage serein, qui durent des mois, des années, des dizaines d’années, sans une minute de faiblesse, sans un retour d’égoïsme, sans un murmure… Aussi je me sens plus étonné encore, plus respectueux et plus petit, devant le troupeau