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LE ROMAN D’UN ENFANT

moindre des maux qu’un collégien est appelé à souffrir.

Les semaines qui suivirent furent affreusement pénibles. Vraiment je sentais mon intelligence se rétrécir sous la multiplicité des devoirs et des pensums ; même le champ de mes petits rêves se fermait peu à peu. Les premiers brouillards, les premières journées grises ajoutaient à tout cela leur désolée tristesse. Les ramoneurs savoyards étaient aussi revenus, poussant leur cri d’automne, qui déjà, les années précédentes, me serrait le cœur à me faire pleurer. Quand on est enfant, l’approche d’un hiver amène des impressions irraisonnées de fin de toutes choses, de mort par le sombre et par le froid ; les durées semblent si longues, à cet âge, qu’on n’entrevoit même pas le renouveau d’après qui ramènera tout.

Non, c’est quand on est déjà pas mal avancé dans la vie et qu’il faudrait au contraire faire plus de cas de ses saisons comptées, c’est seulement alors qu’on regarde un hiver comme rien.

J’avais un calendrier où j’effaçais lentement les jours ; vraiment, au début de cette année de collège, j’étais oppressé par la perspective de tant de mois, et de mois interminables comme ils étaient alors,