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LE ROMAN D’UN ENFANT

dont il faudrait subir le passage avant d’atteindre seulement ces vacances de Pâques, ce répit de huit jours dans l’ennui et la souffrance ; j’étas sans courage, parfois j’avais des instants de désespoir, devant la longueur traînante du temps.

Bientôt le froid, le vrai froid vint, aggravant encore les choses. Oh ! ces retours du collège, les matins de décembre, quand pendant deux mortelles heures on s’était chauffe à l’horrible charbon de terre, et qu’il fallait subir le vent glacé de la rue pour rentrer chez soi ! Les autres petits gambadaient, sautaient, se poussaient, savaient faire des glissades quand par hasard les ruisseaux étaient gelés… Moi, je ne savais pas, et puis cela m’eût semblé de la plus haute inconvenance ; du reste on me ramenait et je revenais posément, transi ; humilié d’être conduit, raillé quelquefois par les autres, pas populaire parmi ceux de ma classe, et dédaigneux de ces compagnons de chaîne avec lesquels je ne me sentais pas une idée commune.

Le jeudi même, il y avait des devoirs qui duraient tout le jour. Des pensums aussi, d’absurdes pensums, que je bâclais d’une affreuse écriture déformée, ou par lesquels j’essayais toutes les ruses écolières, décalcages et porte-plumes à cinq becs.