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LE ROMAN D’UN ENFANT

plus, en était même pour le moment complètement oubliée.

Après ces deux mois charmants, la pénible rentrée des classes, à laquelle je ne pouvais m’empêcher de songer, devait avoir pour grande diversion le retour de mon frère. Ses quatre ans n’étaient pas tout à fait révolus, mais nous savions qu’il venait déjà de quitter l’« île mystérieuse » pour nous revenir, et nous l’attendions en octobre. Pour moi, ce serait presque une connaissance entièrement à faire ; je m’inquiétais de savoir s’il m’aimerait en me revoyant, s’il me trouverait à son goût, si mille petites choses de moi, — comme par exemple ma manière de jouer Beethoven, — lui plairaient.

Je pensais constamment à son arrivée prochaine : je m’en réjouissais tellement et j’en attendais un tel changement dans ma vie, que j’en oubliais complètement ma frayeur habituelle de l’automne.

Mais je me proposais aussi de le consulter sur mille questions troublantes, de lui confier toutes mes angoisses d’avenir ; et je savais du reste que l’on comptait sur ses avis pour prendre un parti définitif à mon sujet, pour me diriger vers les sciences et décider de ma carrière : là était le point noir de son retour.