Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 11.djvu/24

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La morale moderne se trompe. La nudité et l’amour sont des objets de contemplation.


On a dit à la femme d’aujourd’hui : « Vous devez, sous les yeux de trois mille personnes, dans votre loge au théâtre, montrer vos bras nus ; mais si, même à un bal intime, vous laissez, par symétrie, votre jambe découverte, vous serez regardée comme une fille et vous cesserez d’être reçue. » — On lui a dit encore : « Vous devez, sous les yeux de trois mille personnes, au premier rang de votre loge, exposer la partie supérieure de vos seins ; mais s’il vous prend fantaisie de vous habiller de telle sorte que leur moitié inférieure (exactement semblable, cela n’est pas douteux) cesse d’être voilée par la robe, vous serez appréhendée par le garde de service et conduite au poste voisin. »

Il se peut qu’il y ait à cela des raisons très mystérieuses ; pour moi, j’avoue ne pas les entendre, et je tiens cette convenance pour une chinoiserie toute pure, respectable d’ailleurs, comme toutes les modes. En 1797, les jolies femmes s’habillaient d’une mousseline transparente ; en 1897, elles enferment dans une mécanique rigide la souplesse de la taille et des hanches, le centre même de la grâce : à leur aise ! Ce qui est inouï, ce qui passe vraiment l’imagination, c’est qu’il y ait des articles de code, des règle-