Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 11.djvu/29

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on tue sur toutes les scènes. Les spectateurs de l’Ambigu assistent chaque année à un cours complet du crime et de ses applications pratiques. Les dernières découvertes ayant trait à l’art d’assommer un passant, de donner un croc-en-jambe ou de jeter un nœud coulant, d’ouvrir un coffre-fort ou d’ouvrir une poitrine, de dynamiter une maison ou de faire dérailler un train, tout cela est exposé selon une méthode excellente, claire, facile à suivre, et jamais « le législateur » n’a songé à s’en inquiéter.

Mais raconter une nuit de noces ! Voilà qui est pernicieux, n’est-ce pas ? Prenez garde. Glissez ! Il est de certains détails… oh ! oh ! vous allez trop loin. Tout peut se dire en une petite phrase, monsieur, comme dans La Belle au Bois Dormant :

« Et la dame d’honneur leur tira le rideau. »

Tirons le rideau ! Tirons le rideau !…

Il faut que j’aie l’esprit singulier, car, pour moi, une nuit de noces est une cérémonie religieuse et au fond de ma conscience je ne puis comprendre en vertu de quelle loi morale la justice de mon pays ordonnerait de détruire mon livre si je disais un jour, à la face du monde, sans réserves, en pleine lumière, cette communion sacrée.



Qui donc nous a ainsi trompés ? Quelle influence avons-nous subie depuis quinze siècles déjà, mais