Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 12.djvu/32

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Dieu d’oubli ! viens fermer mes yeux ! Ô dieu de paix,
Sommeil ! viens fermer mes yeux !(Élég xxii.)

Ce dernier exemple est tout à fait extraordinaire et fait prévoir toute la révolution de Victor Hugo.

Nous arrivons enfin au vers moderne. Je n’ai fait un si long préambule que pour décharger la nouvelle école du crime ou de la gloire d’avoir disloqué l’alexandrin. M. Sully-Prud’homme s’attaque au-dessus de nous aux trois plus grands poëtes français : Ronsard, Chénier et Hugo. Le premier avait ébranlé le rythme, le second l’a assoupli, le troisième l’a brisé et refondu, et si complètement que rien après lui ne reste plus à faire, comme j’espère le montrer tout à l’heure.



Le nouveau vers alexandrin se distingue de l’orthodoxe en ce qu’il a normalement deux césures au lieu d’une, lesquelles peuvent se placer à un point quelconque du vers. C’est la forme qu’il affecte le plus ordinairement ; mais il peut avoir une césure seulement ou plusieurs, à l’état d’exception.

Les deux césures normales partagent le vers en trois tristiches, le plus souvent inégaux entre eux, et échappant à la règle de M. Sully-Prud’homme.