Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 3.djvu/99

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Et Danaë répondit :

« Je sais bien à peu près ce qu’il y a derrière cette porte. Le malheur, c’est toujours la même chose. C’est un bonheur ancien qui ne veut pas recommencer… »

Et elle continua, comme en rêve :

« Quel bonheur ai-je eu jamais qui fût égal à celui-là ? Je sais bien ce qui va arriver. C’est-à-dire… je ne le sais pas tout à fait, mais je devine bien à peu près. Éclaire-moi plus haut, nourrice. Je vais ouvrir la porte.

— Ce n’est même pas la porte du tombeau. C’est quelque chose de plus horrible… c’est… Oh ! je ne peux pas vous le dire. Vous le verrez, Danaë. C’est votre destin que vous le voyiez vous-même. On ne peut plus vous en empêcher. Vous-même ne pourriez plus vous en aller d’ici.

— La porte n’est pas lourde. Les gonds sont luisants. On doit l’ouvrir souvent, cette porte, n’est-ce pas ? Comment se fait-il qu’on s’occupe tant de mon malheur et qu’il n’en paraisse rien dans les yeux ? Ou bien, peut-être est-ce un malheur pour moi seule et un bonheur pour tous les autres. — La porte va céder. Je n’aurais qu’à la toucher du bout du doigt, je sens qu’elle va tourner toute seule… Vois-tu, tiens, vois-tu ? vois-tu ?… »

Un monceau de pièces d’or s’écroula autour d’elle par la porte grande ouverte. Elle poussa un cri effrayant.