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VI

LA ROSE DE CHRYSIS


C’était une procession blanche, et bleue, et jaune, et rose, et verte.

Trente courtisanes s’avançaient, portant des corbeilles de fleurs, des colombes de neige aux pieds rouges, des voiles du plus fragile azur, et des ornements précieux.

Un vieux prêtre, barbu de blanc, enveloppé jusqu’autour de la tête dans une raide étoffe écrue, marchait devant le jeune cortège et guidait vers l’autel de pierre la file des dévotes inclinées.

Elles chantaient, et leur chant traînait comme la mer, soupirait comme le vent du midi, haletait comme une bouche amoureuse. Les deux premières portaient des harpes qu’elles soutenaient au creux de leur main gauche et qui se courbaient en avant comme des faucilles de bois grêle.