Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 4.djvu/286

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quatre pas jusqu’à la fenêtre, et s’adossa dans l’ouverture en regardant le jour se lever.


Chrysis s’était assise sur le lit très bas, le regard fixe et presque hébété.


Alors Démétrios se parla en lui-même.

« Il vaut mieux, se dit-il, qu’il en soit ainsi. De tels jeux au moment de la mort seraient en somme assez lugubres. J’admire seulement qu’elle n’en ait pas eu, dès le début, le pressentiment, et qu’elle m’ait accueilli avec cet enthousiasme. Pour moi, c’est une aventure terminée. Je regrette un peu qu’elle s’achève ainsi, car, à tout prendre, Chrysis n’a eu d’autre tort que d’exprimer très franchement une ambition qui eût été celle de la plupart des femmes, sans doute, et s’il, ne fallait pas jeter une victime à l’indignation du peuple, je me contenterais de faire bannir cette jeune fille trop ardente, afin de me délivrer d’elle tout en lui laissant les joies de la vie. Mais il y a eu scandale et nul n’y peut plus rien. Tels sont les effets de la passion. La volupté sans pensée, ou le contraire, l’idée sans jouissance n’ont pas de ces funestes suites. Il faut avoir beaucoup de maîtresses, mais se garder, avec l’aide des dieux, d’oublier que les bouches se ressemblent. »


Ayant ainsi résumé par un audacieux apho-