Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 4.djvu/72

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

celui de mon amie Bacchis qui m’a pris un amant la semaine dernière et s’est moquée de moi méchamment dans une petite débauche qu’elle a faite avec Tryphèra, Mousarion et quelques jeunes sots m’ont tout rapporté. C’est un miroir auquel elle tient beaucoup, parce qu’il a appartenu à Rhodopis, celle qui fut esclave avec Ésope et rachetée par le frère de Sapphô. Tu sais que c’est une courtisane très célèbre. Son miroir est magnifique. On dit que Sapphô s’y est mirée, et c’est pour cela que Bacchis y tient. Elle n’a rien de plus précieux au monde ; mais je sais où tu le trouveras. Elle me l’a dit, une nuit, étant ivre. Il est sous la troisième pierre de l’autel. C’est là qu’elle le met tous les soirs quand elle sort au coucher du soleil. Va demain chez elle à cette heure-là et ne crains rien : elle emmène ses esclaves.

— C’est de la folie, s’écria Démétrios. Tu veux que je vole ?

— Est-ce que tu ne m’aimes pas ? Je croyais que tu m’aimais. Et puis est-ce que tu n’as pas juré ? Je croyais que tu avais juré. Si je me suis trompée, n’en parlons plus. »


Il comprit qu’elle le perdait, mais se laissa entraîner sans lutte, presque volontiers.

« Je ferai ce que tu dis, répondit-il.

— Oh ! Je sais bien que tu le feras. Mais tu hésites d’abord. Je comprends que tu hésites.