dans le troisième il est question de toi, sous les traits d’une fille perdue.
« Elle m’avait dit cela si brusquement… Je me trouvai mal tout de suite et perdis conscience…
« Lorsque je fus de nouveau capable de l’entendre, Mina continuait :
« — Oui, oui, c’est affreux ; mais il faut que tu lises, Esther, il faut que tu lises. C’est une Hollandaise, te dis-je ; elle s’appelle Esther, comme toi ; Gobseck, comme ton père : c’est ton nom, c’est toi enfin, à toutes les pages de cet horrible livre. S’il continue de se vendre, ce roman de l’enfer, tu es déshonorée, ma fille, comprends-tu ; il faut agir tout de suite, aller à Paris, parler à l’auteur… »
« Miséricorde ! quel malheur sur moi ! Mina m’a montré quelques pages. Ce troisième roman s’appelle la Torpille[1]… Esther Gobseck… Esther Gobseck… En effet, c’est moi, c’est le nom de mon père… et dans quelle compagnie, Seigneur ! dans quelles maisons ! Ah ! mon Dieu ! quel malheur sur moi ! Mon Dieu ! mon Dieu ! je n’y survivrai pas ! Mon Dieu ! faut-il avoir vécu comme je l’ai fait pendant vingt-sept ans selon la sagesse et parfois au prix de quelles luttes avec mes penchants naturels ! Faut-il avoir tout sacrifié aux fortifications de cette maison pure où je veux qu’habite
- ↑ La première partie de Splendeurs et Misères parut sous ce titre en octobre 1838, en même temps que La Femme supérieure et La Maison Nucingen.