Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 7.djvu/203

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

elle est entre nos mains. Ce n’est pas pour nous qu’est écrit le fameux verset de Salomon sur la trace invisible de l’aigle dans les cieux et du jeune homme chez la jeune femme. « La femme mange, et s’essuie la bouche », puis elle dit : « Je n’ai point fait de mal. » Elle le dit à d’autres qu’à son médecin.

Somme toute, il ne nous manque guère que l’aveu de la faute en soi, du péché en tant que péché. Cet aveu-là serait, en apparence, identique à celui que nous entendons, puisqu’il est d’abord l’exposé du même acte et puisque, au surplus, c’est toujours la crainte qui le provoque. Qu’il s’agisse de sa guérison physique ou de son salut, la femme redoute la mort dans le premier cas, l’enfer dans le second, et c’est un égal sentiment d’épouvante qui la pousse à livrer son secret. Eh bien ! en fait, les deux aveux sont assez différents de caractère, néanmoins. Si laconique que soit celui dont nous ne sommes pas les confidents, il est, comment dirai-je ? plus joli. La pénitente ne s’avoue pas qu’elle est contrainte et forcée par l’idée des peines éternelles. La chère petite sait qu’elle doit se repentir, et, pendant une minute, l’illusion du remords se fait réalité. Je vous en parle ici en connaissance de cause, car le hasard a voulu que je fusse, un jour, et médecin et confesseur : doctor in utroque, comme disaient nos pères.

Il y a une vingtaine d’années, j’étais appelé