Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 8.djvu/18

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elles, je ne pense pas que vous l’ignoriez ? Mais comme on prétend aussi que vous les dites très bien et que vous possédez l’art de les faire accepter, il est convenu que l’on peut rougir, mais non se blesser de vos récits. Vous en abusez cruellement. Ce soir-là, j’ai failli quitter la pièce.

— Je ne me rappelle pas du tout ce que j’ai pu dire.

— Il était question d’une boîte à rubans verts venue du Japon… Votre mémoire s’éclaire, n’est-ce pas ?… Un nécessaire de méditation pour jeunes filles rêveuses… Mais vous n’attendez pas que je vous le décrive à mon tour ?… Vous parliez dans un éventail pour ne pas être entendu par une belle personne qui feuilletait un album sur une table voisine : Mlle de Vieux-Cernay, que ses petites amies appelaient tout bas Mlle des Yeux Cernés pendant la mode des surnoms… Je l’observais tandis que vous parliez. Elle devenait rouge, puis blême, puis cramoisie. Elle n’a pas perdu un mot des abominables détails que vous nous avez laissé demander un à un, roué que vous êtes, comme si vous vouliez nous offrir la responsabilité du sujet et de ses développements. Ce soir-là, elle aurait donné plus que sa vertu pour avoir votre nécessaire. Si vous ne l’avez pas séduite le lendemain…

— Mlle de Vieux-Cernay ? Mais on ne la séduit qu’en songe.

— Taisez-vous, vous dites des horreurs… Et