Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 9.djvu/332

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autres, et qu’ils entendent flotter dans les profondeurs, avec des majestés infinies !

Et toi-même, tu le sais bien, toi qui te plais à rapprocher, dans leur gradation chronologique, Dante, Hamlet, Faust et la Légende, quatre marches montant d’âge en âge vers un idéal toujours rapproché. Mais désormais, — et c’est ici que tu errais — la voie de Dieu est différente. Le progrès a cessé de se faire par la foule ; seuls les esprits, quasi cursores, se succèdent, singuliers ; et d’être désirée d’eux seuls, la Beauté s’est sentie plus pure. Or, médite la Légende des siècles. C’est aujourd’hui le dernier échelon, la plus haute altitude gravie. Sois-y souvent arrêté, si tu veux voir Dieu de plus près ; et demande-toi, quand pour la millième fois tu la tiendras entre tes mains, de quelle matière inconnue sera pétri le cerveau du poète promis à la terre, qui vers la fin du siècle prochain, quand tu ne seras plus là pour l’entendre, chantera plus haut que le Satyre la gloire de Dieu presque réalisé.


Paris, 13 septembre, 11 h. 5.

Je ne pense que quand j’écris.

Dans la rue, à la campagne, en voyage, j’amasse des sensations confuses sans pouvoir les coordonner ; et je ne sais dégager l’idée que sur le papier. Ma tête est paresseuse et répugne à produire ; pour