Page:Louÿs - Aphrodite. Mœurs antiques, 1896.djvu/223

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s’interdit par le mariage l’autre face de la volupté ! Ainsi une jeune fille peut se dire, à l’âge où elle est toute ardeur : « Je connaîtrai mon mari, plus dix amants, peut-être douze, » et croire qu’elle mourra sans avoir rien regretté ? Trois mille femmes pour moi ce ne sera pas assez, le jour où je quitterai la vie.

— Tu es ambitieux, dit Chrysis.

— Mais de quel encens, de quels vers dorés, s’écria le doux Philodème, ne devons-nous pas louer à jamais les bienfaisantes courtisanes ! Grâce à elles nous échappons aux précautions compliquées, aux jalousies, aux stratagèmes, aux battements de cœur de l’adultère. Ce sont elles qui épargnent les attentes sous la pluie, les échelles branlantes, les portes secrètes, les rendez-vous interrompus et les lettres interceptées et les signaux mal compris. Ô chères têtes, que je vous aime ! Avec vous, point de siège à faire : pour quelques petites pièces de monnaie vous nous donnez, et au delà, ce qu’une autre saurait mal nous accorder comme une grâce après les trois semaines de rigueur. Pour vos âmes éclairées l’amour n’est pas un sacrifice, c’est une faveur égale qu’échangent deux amants ; aussi les sommes qu’on vous