Page:Louÿs - Aphrodite. Mœurs antiques, 1896.djvu/99

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t’éveilles vers le soir, il me semble que je ne t’ai jamais vue. Je crois bien que tu n’es pas une fille : tu es une petite nymphe d’Arcadie qui a quitté les forêts parce que Phoïbos a tari sa fontaine. Ton corps est souple comme une branche d’olivier, ta peau est douce comme l’eau en été, l’iris tourne autour de tes jambes et tu portes la fleur de lôtos comme Astarté la figue ouverte. Dans quel bois peuplé d’immortels ta mère s’est-elle endormie, avant ta naissance bienheureuse ? et quel aegipan indiscret, ou quel dieu de quel divin fleuve s’est uni à elle dans l’herbe ? Quand nous aurons quitté cet affreux soleil africain, tu me conduiras vers ta source, loin derrière Psophis et Phénée, dans les vastes forêts pleines d’ombres où l’on voit sur la terre molle la double trace des satyres mêlée aux pas légers des nymphes. Là, tu chercheras une roche polie et tu graveras dans la pierre ce que tu avais écrit sur la cire : les trois mots qui sont notre joie. Écoute, écoute, Rhodis ! Par la ceinture d’Aphrodite, où sont brodés tous les désirs, tous les désirs me sont étrangers puisque tu es plus que mon rêve ! Par la corne d’Amaltheia d’où s’échappent tous les biens du monde,