Page:Louÿs - Histoire du roi Gonzalve et des douze princesses, 1927.djvu/16

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Si échauffée qu’elle parût, Chloris toutefois savait bien ce qu’elle disait et se tint assurée de ne déplaire à personne en prenant son rôle au sérieux pour répondre ce qui suit :

« Le protocole ne permet pas que le souverain prenne la même pucelle deux fois de suite ; mais elle peut nommer trois de ses sœurs entre lesquelles le roi daignera désigner celle qui va passer la nuit avec nous.

— La plus belle, c’est Prima ; la plus vicieuse, c’est Puella ; mais celle qui serait la plus contente…

— C’est Tertia ! fit Chloris.

— Oh ! oui !

— J’ignore pour quelles raisons, dit le roi ; mais j’aime les bonnes volontés. Faites appeler Tertia. Je me retire quelque temps et vous donne le loisir de préparer ses esprits. »



Tertia ne tarda guère à paraître, toute brune et vive, grande et mince, vêtue d’une chemise de soie jaune, les pieds nus dans ses mules et les cheveux flottants.

Avec elle, un nouveau langage anima la scène :

« Quel bordel que ce palais ! Qu’est-ce que tu fous-là toute nue, chameau d’enfant ? dit-elle à Septima qui rit.

— Et toi ? pourquoi ta natte n’est-elle pas faite à onze heures du soir ?

— Parce qu’à l’heure où toutes les filles se fourrent les dix doigts dans les poils du cul, elles ne trouvent pas deux mains pour natter leurs cheveux, espèce d’innocente !

— Innocente ? ricana la petite.