Page:Louÿs - Les aventures du roi Pausole, 1901.djvu/360

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yeux croyaient voir tous les yeux fixés sur un point de sa personne, et cela ne pouvait pas se supporter, — au moins de la part d’une multitude.

Elle entra donc dans une boutique et expliqua ce qu’elle désirait.

— Oh ! madame, fit la marchande, en la considérant des pieds à la tête, ce n’est pas mon intérêt de parler comme je le fais, mais quel dommage d’habiller madame ! Quand on a la poitrine si jeune, le ventre si fin, les jambes si bien faites, peut-on cacher des choses pareilles ?

— C’est mon caprice, dit Mirabelle.

— Alors, mettez des transparents… Je peux faire à madame une petite robe Empire en linon blanc sans doublure, très collante autour des hanches… De loin, cela fait robe, et de près, c’est comme si l’on n’avait rien… J’ai là du linon tout ce qu’il y a de léger. On lirait le journal à travers. Madame veut-elle essayer ?… Ou bien est-ce que madame préfère le tulle noir ? mais c’est plutôt robe de bal.

— Non, rien de tout cela. De la batiste, des bas de fil, une jupe de toile toute faite et une chemisette bleue, voilà ce qu’il me faut. Donnez-en autant à ma sœur qui désire s’habiller exactement comme moi.