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Page:Louis-d-elmont-l-inceste royal-1925.djvu/10

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lons tout, en historien scrupuleux de l’exactitude, il leur est même arrivé d’échanger déjà un baiser…

Voilà le nuage dans le ciel bleu de la cour de Sigourie, voilà d’où va naître le grand scandale qui dérangera tous les projets, fera échouer toutes les ambitions du duc de Boulimie.

Ce soir-là, Hector et Séraphine s’étaient échappés chacun de leur côté pour se retrouver dans les jardins du palais. La nuit tombait, une nuit complice aux deux amoureux.

Et le fils du grand sénéchal, entraînant la princesse vers un coin discret, lui disait :

— Séraphine, j’ai la mort dans l’âme. On ne parle que de votre prochain mariage avec le roi… Je n’y survivrai pas, vous le savez.

— Hector… je vous en supplie, n’en croyez rien. Jusqu’au dernier moment, je lutterai pour ne pas m’y soumettre.

— Hélas ! Je crains bien que vous ne puissiez refuser… On vous opposera la raison d’État.

— Cependant je sais que la reine-mère et votre père, le grand sénéchal, sont hostiles à ce projet. Le roi lui-même ne me marque aucun penchant. Il me traite en parente et c’est tout. Je crois même qu’il affecte de ne me témoigner aucune familiarité.

— Ainsi, il serait notre meilleur allié. Mais je crains quand même qu’à la fin il ne cède, lui aussi. Ô Séraphine, je redoute tout pour notre amour… Aussi ai-je fait un audacieux projet ; si vous y consentez, je vous enlèverai et nous partirons ensemble pour les pays barbaresques où nous pourrons nous aimer loin de Sigourie… Je préfère l’exil à votre perte…

La princesse s’enthousiasma aussitôt pour ce beau projet.

— Oh ! dit-elle… Oui, je le veux bien. Enlevez-moi… Vous serez mon chevalier, et je serai votre dame d’amour.

— Que ne l’êtes-vous déjà ?…

— Je la suis, Hector… Faites de moi ce que vous voudrez.

— Vos paroles me transportent, et me communiquent un désir d’aimer infini… Séraphine… Séraphine, je t’adore…

Emporté par une juvénile ardeur, le fils du sénéchal prenait dans ses bras la jeune princesse, et follement la couvrait de baisers, embrassant ses cheveux d’or, ses yeux bleus, et ses lèvres roses, les lèvres surtout sur lesquelles il s’attardait longuement, si bien que la jeune fille, gagnée par la folie de son amant, lui rendait aussitôt baisers pour baisers.

— Oh ! dit Hector. Je veux que tu sois mienne dès ce soir.

Il souleva dans ses bras la jolie Séraphine, et, l’amour lui donnant des forces, l’emporta en courant vers un petit pavillon de chasse qui était dissimulé derrière un bosquet