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Page:Louis-d-elmont-l-inceste royal-1925.djvu/9

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lui font craindre de perdre les bonnes grâces du roi ? Serait-ce pour d’autres raisons mystérieuses qu’il est seul à connaître ? Nul ne le sait, hormis peut-être la reine-mère Radegonde et Benoni XIV lui-même.

Benoni XIV, à vrai dire, ne paraît pas très empressé auprès de Séraphine. Benoni XIV n’est d’ailleurs empressé auprès d’aucune femme. C’est même un phénomène surprenant et unique dans la famille royale de Sigourie, car tous ses aïeux sont aussi célèbres dans les fastes de l’histoire pour leurs aventures galantes que pour leurs exploits glorieux, et le royaume pullule de gentilshommes qui se proclament descendants de bâtards royaux et se prévalent des faiblesses d’une de leurs grand’mères ou de leurs arrière-grand’mères pour un ancêtre du prince régnant.

Benoni XIV est le seul qui ait atteint sa vingtième année sans qu’on lui connût de maîtresse au point que les ennemis du pouvoir — il en est malheureusement en Sigourie comme ailleurs — l’ont surnommé le « Roi Puceau ».

Sans doute à cause de sa naissance posthume, ce souverain est resté de frêle complexion. Il n’a jamais fait aucune maladie grave, et cependant il paraît faible ; il est beau, sans doute, mais d’une beauté qui n’a rien de mâle et ses traits n’ont aucune rudesse ; il semble, à vingt ans, être resté un jeune adolescent.

Son cousin le duc de Boulimie est d’autant plus pressé de le voir épouser sa fille, car il espère que Benoni XIV, avec une aussi fragile apparence physique, ne vivra pas très longtemps, et que si Dieu bénissait rapidement l’union royale, il deviendrait, sous le couvert de sa fille, tôt restée veuve, le véritable maître du pays.

Mais il y a un autre obstacle au mariage tant désiré par les augustes parents de la princesse Séraphine, un obstacle ignoré de tous, c’est que Séraphine n’est pas du tout enthousiaste de cette union. La princesse ne ressent aucun amour pour un souverain qui n’a guère que l’apparence de la virilité… Disons mieux, la princesse Séraphine est amoureuse d’un autre personnage, qu’elle voit chaque jour à la cour, et qu’honore de son amitié personnelle le jeune roi.

Et il se trouve, comme par hasard, que ce personnage n’est autre que le fils du grand sénéchal, Hector de Vergenler, qui, on le sait, est exactement du même âge que la princesse, puisque tous deux furent conçus dans la même nuit qui suivit le jour où naquit Benoni XIV.

Hector de Vergenler est un beau jeune homme de dix-neuf ans, habile à tous les jeux de chevalerie, qui a conquis le cœur de la princesse, malgré qu’il ne soit pas de sang royal. Et lui-même nourrit à l’égard de Séraphine une passion violente, qu’il n’a pas hésité, un soir, à lui déclarer… Révé-