Page:Louis Antoine de Bougainville - Voyage de Bougainville autour du monde (années 1766, 1767, 1768 et 1769), raconté par lui-même, 1889.djvu/63

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Il ne diffère de ceux d’Europe que par son col d’un noir velouté, qui fait un admirable contraste avec la blancheur du reste de son corps ; ses pattes sont couleur de chair. Cette espèce de cygne se trouve aussi dans la rivière de la Plata et au détroit de Magellan, où j’en ai tué un dans le fond du port Galant.

Quatre espèces d’oies sauvages formaient une de nos plus grandes richesses. La première ne fait que pâturer ; on lui donna improprement le nom d’outarde. Ses jambes élevées lui sont nécessaires pour se tirer des grandes herbes, et son long col pour observer le danger ; sa démarche est légère, ainsi que son vol ; elle n’a point le cri désagréable de son espèce. Le plumage du mâle est blanc, avec des mélanges de noir et de cendré sur le dos et les ailes. La femelle est fauve, et ses ailes sont parées de couleurs changeantes ; elle pond ordinairement six œufs. Leur chair saine, nourrissante et de bon goût, devint notre principale nourriture ; il était rare qu’on en manquât ; indépendamment de celles qui naissent sur l’île, les vents d’est en automne en amènent des volées, sans doute de quelque terre inhabitée : car les chasseurs reconnaissaient aisément ces nouvelles venues au peu de crainte que leur inspirait la vue des hommes. Les trois autres espèces d’oies n’étaient pas si recherchées ; comme elles se nourrissent de poisson, elles en contractent un goût huileux. Leur forme est moins élégante que celle de la première espèce. Il y en a même une qui ne s’élève qu’avec peine au-dessus des eaux : celle-ci est criarde. Les couleurs de leur plumage ne sortent guère du blanc, du noir, du fauve et du cendré. Toutes ces espèces, ainsi que les cygnes, ont sous leurs plumes un duvet blanc ou gris très fourni.

Deux espèces de canards et deux de sarcelles embellissent les étangs et les ruisseaux. Les premiers diffèrent peu de ceux de nos climats ; on en tua quelques-uns tout noirs et d’autres tout blancs. Quant aux sarcelles, l’une, à bec bleu, est de la taille des canards, l’autre est de beaucoup plus petite. On en vit qui avaient les plumes du ventre teintes d’incarnat. Ces espèces sont de la plus grande abondance et du meilleur goût.