Aller au contenu

Page:Louis Delaporte - Voyage d'exploration en Indo-Chine, tome 1.djvu/482

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

filles Pa-y avec leur toute petite veste, leurs jupons bordés d’une large bande de couleur et leur corset serré. Quelques-unes sont jolies. Les hommes portent un petit turban aplati ; leur fine moustache et leur maigre physionomie les font ressembler beaucoup aux Annamites.

Au dire des Chinois, les Laotiens qui habitent cette zone n’ont plus de pagodes. À l’inverse de ce qui se passe chez les Does, ils semblent sur le point de redevenir sauvages ; les conquérants rendent justice à leur bonne nature et les considèrent comme beaucoup plus doux que les sauvages lolos.

La vie est moins chère à Yuen-kiang que dans les villes que nous venions de traverser ; la pomme de terre ne coûte qu’un sou la livre. Les oies, les canards, les cochons, abondent dans les basses-cours. Les oranges sont délicieuses et se donnent pour rien. La plaine produit beaucoup de sucre et de coton. Nous retrouvons ici la petite machine à égrener des Annamites ; on tisse le coton sur les lieux mêmes en étoffes grossières teintes de couleurs éclatantes. Dans les montagnes qui avoisinent Yuen-kiang se trouve le chevrotin porte-musc.

M. Joubert alla visiter, à quelques kilomètres au nord de la ville, la mine de cuivre de Tsin-long ; c’est un des gisements les moins considérables de toute cette province qui en possède de si nombreux et de si riches.

Le Ho-ti kiang a, vis-à-vis de Yuen-kiang, de 150 à 200 mètres de large, ses eaux sont calmes et peu profondes, et de nombreux bancs de sable apparaissent sur ses bords. L’altitude de la vallée du fleuve est de 500 mètres.

Nous descendîmes le fleuve en barque, le 26 novembre. Les autorités de la ville assistaient à notre départ. Nous allions rejoindre la route de Che-pin qui part de la rive gauche à quelque distance en aval. Au-dessous de Yuen-kiang, la vallée se rétrécit, et des murailles arides et rocheuses, d’un aspect peu pittoresque, se dressent sur les bords de la rivière dont le cours devient plus sinueux et les eaux plus rapides. Après trois heures de navigation, nous arrivâmes à Pou-pio, village Pa-y, à toits plats et à doubles terrasses. Il est situé sur la rive gauche du fleuve auprès d’un rapide infranchissable pour les barques.

Comme tous les villages de cette région, Pou-pio est entouré d’une muraille en terre. Ces montagnes sont peu sûres : un pauvre sauvage qui était venu le matin nous vendre des comestibles, nous était revenu le soir, sanglant et dépouillé ; on lui avait enlevé sa pauvre bourse et désarticulé le bras. La construction en terrasse donne aux maisons un aspect arabe que leur teinte grise contribue à accentuer ; cette forme de toit, adoptée, soit par économie, soit en raison de la difficulté de cuire des briques, a l’avantage dans les pays montagneux de donner plus de place aux habitants que la rapidité des pentes force à se rapprocher les uns des autres. La seconde terrasse, qui s’étage au-dessus de la première comme une haute marche d’escalier, est abritée d’un toit léger sous lequel on fait sécher la noix d’arec. Les portes du village sont fermées le soir et l’on y monte la garde pendant toute la nuit.

Au-dessus de Pou-pio, on remarque, le long des flancs de la montagne, une ligne de