Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/12

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dant, mais la recherche attentive des mobiles élevés de sa conduite.

Lorsque des faits extraordinaires attestent un génie éminent, quoi de plus contraire au bon sens que de lui prêter toutes les passions et tous les sentiments de la médiocrité ? Quoi de plus faux que de ne pas reconnaître la prééminence de ces êtres privilégiés qui apparaissent de temps à autre dans l’histoire comme des phares lumineux, dissipant les ténèbres de leur époque et éclairant l’avenir ? Nier cette prééminence serait d’ailleurs faire injure à l’humanité, en la croyant capable de subir, à la longue et volontairement, une domination qui ne reposerait pas sur une grandeur véritable et sur une incontestable utilité. Soyons logiques, et nous serons justes.

Trop d’historiens trouvent plus facile d’abaisser les hommes de génie que de s’élever, par une généreuse inspiration, à leur hauteur, en pénétrant leurs vastes desseins. Ainsi, pour César, au lieu de nous montrer Rome déchirée par les guerres civiles, corrompue par les richesses, foulant aux pieds ses anciennes institutions, menacée par des peuples puissants, les Gaulois, les Germains et les Parthes, incapable de se soutenir sans un pouvoir central plus fort, plus stable et plus juste ; au lieu, dis-je, de tracer ce tableau fidèle, on nous représente César, dès son jeune âge, méditant déjà le pouvoir suprême. S’il résiste à Sylla, s’il est en désaccord avec Cicéron, s’il se lie avec Pompée, c’est par l’effet de cette astuce prévoyante qui a tout deviné pour