Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/218

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vrée désormais de tout frein salutaire, s’abandonner aux excès d’une puissance sans limites[1].

Salluste fait le tableau suivant de l’état de la société : « Lorsque, affranchis de la crainte de Carthage, les Romains eurent le loisir de se livrer à leurs dissensions, alors s’élevèrent de toutes parts des troubles, des séditions, et enfin des guerres civiles. Un petit nombre d’hommes puissants, dont la plupart des citoyens recherchaient bassement la faveur, exercèrent un véritable despotisme sous le nom imposant tantôt du sénat, tantôt du peuple. Le titre de bon et de mauvais citoyen ne fut plus le prix de ce qu’on faisait pour ou contre la patrie, car tous étaient également corrompus ; mais plus on était riche et en état de faire impunément le mal, pourvu qu’on défendît l’ordre présent des choses, plus on passait pour homme de bien. Dès ce moment, les antiques mœurs ne se corrompirent plus par degrés comme autrefois ; mais la dépravation se répandit avec la rapidité d’un torrent, et la jeunesse fut tellement infectée du poison du luxe et de l’avarice, qu’on vit une génération de gens dont il fut juste de dire qu’ils ne pouvaient avoir de patrimoine ni souffrir que d’autres en eussent[2]. »

L’agrandissement de l’Empire, le contact fréquent avec les étrangers, l’introduction de nouveaux principes philosophiques et religieux, les immenses richesses apportées en Italie par la guerre et le commerce, tout avait concouru à altérer profondément le caractère national. Il s’était fait un échange de populations, d’idées et de coutumes. D’un côté, les Romains, soldats, négociants ou publicains, en se répandant en foule dans toutes les parties du monde[3], avaient

  1. « La corruption s’était surtout accrue, parce que, la Macédoine détruite, l’empire du monde semblait désormais assuré à Rome. » (Polybe, XI, xxxii.)
  2. Salluste, Fragm. I, x.
  3. Les Romains s’expatriaient à tel point que, lorsque Mithridate commença