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Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/217

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CHAPITRE SIXIÈME.

LES GRACQUES, MARIUS ET SYLLA.

(621-676.)

État de la République.

I. Le temps du désintéressement et des stoïques vertus était passé ; il avait duré près de quatre cents ans, et, pendant cette période, l’antagonisme créé par la divergence des opinions et des intérêts n’avait jamais amené de conflits sanglants. Le patriotisme de l’aristocratie, le bon sens du peuple avaient su éviter cette fatale extrémité ; mais, à dater des premières années du viie siècle, les choses changèrent de face, et on ne vit, à chaque proposition de réforme, à chaque convoitise du pouvoir, que séditions, guerres civiles, massacres, proscriptions.

« La République, dit Salluste, dut sa grandeur à la sage politique d’un petit nombre de bons citoyens[1], » et l’on peut ajouter que sa décadence commença le jour où leurs successeurs cessèrent d’être dignes de leurs devanciers. En effet, la plupart de ceux qui, depuis les Gracques, jouèrent un grand rôle furent si égoïstes et si cruels qu’il est difficile de distinguer, au milieu de leurs excès, quel était le représentant de la meilleure cause.

Tant que Carthage exista, semblable à un homme qui s’observe en présence d’un concurrent dangereux, Rome se montra jalouse de maintenir la pureté et la sagesse de ses anciens principes ; mais, Carthage abattue, la Grèce subjuguée, les rois d’Asie vaincus, on vit la République, déli-

  1. Salluste, Fragm. I, viii.