Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/225

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était encore temps. Au moment de son élévation au tribunat, en 621, il reprit, avec l’approbation des hommes et des philosophes les plus considérés, le projet qu’avait eu Scipion Émilien[1] de distribuer aux pauvres le domaine public[2]. Le peuple lui-même demandait cette mesure à grands cris, et tous les jours les murs de Rome étaient couverts d’inscriptions pour la réclamer[3].

Tiberius, dans une harangue au peuple, signala avec éloquence tous les germes destructeurs de la puissance romaine, et traça le tableau de la déplorable position des citoyens répandus sur le territoire de l’Italie, sans asile où reposer leur corps affaibli par la guerre, après avoir versé leur sang pour la patrie. Il cita des exemples révoltants de l’arbitraire de certains magistrats, qui avaient fait mourir des hommes innocents sous les plus futiles prétextes[4].

Il parla ensuite avec mépris des esclaves, de cette classe remuante, peu sûre, envahissant les campagnes, inutile pour le recrutement des armées, dangereuse pour la société, comme le prouvait la dernière insurrection de Sicile. Enfin il proposa une loi qui n’était que la reproduction de celle de Licinius Stolon, tombée en désuétude. Elle avait pour but de retirer à la noblesse une partie des terres du domaine,

  1. Plutarque, Tib. Gracchus, ix.
  2. « Ce fut à l’instigation du rhéteur Diophane et du philosophe Blossius, et il prit conseil des citoyens de Rome les plus distingués par leur réputation et leurs vertus, entre autres Crassus, le grand pontife, Mucius Scævola, célèbre jurisconsulte, alors consul, et Appius Claudius, son beau-père. » (Plutarque, Tib. Gracchus, ix.)
  3. Plutarque, Tib. Gracchus, ix.
  4. Aulu-Gelle rend compte de deux passages du discours de C. Gracchus, qu’il faut plutôt, selon nous, attribuer à Tib. Sempronius Gracchus. Dans l’un il signale le fait d’un jeune noble qui fait assassiner un paysan parce qu’il lui avait adressé une plaisanterie en le voyant passer en litière ; dans l’autre il raconte l’histoire d’un consul qui fait frapper de verges l’homme le plus considérable de la ville de Teanum, parce que la femme du consul, voulant se baigner, avait trouvé les bains de la ville malpropres. (Aulu-Gelle, X, iii.)