Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/234

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rendre au sénat l’affection du peuple. Caius Gracchus avait voulu admettre les alliés jouissant du droit latin au droit de cité ; Drusus fit déclarer que, comme les citoyens romains, ils ne seraient plus battus de verges. D’après la loi des Gracques, les terres distribuées aux citoyens pauvres étaient grevées d’une redevance au profit du trésor public ; Drusus les en affranchit[1]. Pour faire concurrence à la loi agraire, il obtint la création de douze colonies de trois mille citoyens chacune. Enfin on crut nécessaire d’éloigner Caius Gracchus lui-même, en le chargeant de conduire à Carthage, pour en relever les ruines, la colonie de six mille individus pris dans toutes les parties de l’Italie[2], et dont il avait obtenu l’établissement.

Pendant son absence les choses changèrent de face. Si, d’un côté, les propositions de Drusus avaient satisfait une partie du peuple, de l’autre, Fulvius, ami de Caius, esprit exalté, en compromettait la cause par des exagérations dangereuses. Opimius, ennemi acharné des Gracques, se présentait pour le consulat. Instruit de ces diverses menées, Caius revint précipitamment à Rome briguer un troisième tribunat. Il échoua, tandis qu’Opimius, nommé consul, en vue de combattre un parti si redoutable aux grands, faisait renvoyer de la ville tous les citoyens qui n’étaient pas Romains, et, sous un prétexte religieux, tentait d’obtenir la révocation du décret relatif à la colonie de Carthage. Le jour de la délibération arrivé, deux partis occupèrent de bonne heure le Capitole.

Le sénat, vu la gravité des circonstances et dans l’intérêt de la sûreté publique, investit le consul de pouvoirs extraordinaires, déclarant qu’il fallait exterminer les tyrans, qualification perfide, toujours employée contre les défenseurs du

  1. Plutarque, C. Gracchus, xii.
  2. Appien, Guerres civiles, I, iii, 24.