Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/238

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enfin ils traitent vos alliés en ennemis, vos ennemis en alliés[1]. »

Il rappela ensuite tous les crimes de Jugurtha. Celui-ci se leva pour se justifier ; mais le tribun C. Babius, avec lequel il s’était entendu, ordonna au roi de garder le silence. Le Numide allait recueillir le fruit de tant de corruptions accumulées, lorsque, ayant fait assassiner à Rome un prétendant dangereux, Massiva, petit-fils de Masinissa, il devint l’objet de la réprobation publique, et fut forcé de retourner en Afrique. La guerre alors recommence ; le consul Albinus la laisse traîner en longueur. Rappelé à Rome pour tenir les comices, il confie le commandement à son frère le propréteur Aulus, dont l’armée, bientôt pervertie par Jugurtha, se laisse envelopper et se trouve réduite à une capitulation déshonorante. L’indignation à Rome est à son comble. Sur la proposition d’un tribun, s’ouvre une enquête contre tous les complices présumés des méfaits de Jugurtha : ils furent punis, et, comme il arrive souvent dans de telles circonstances, la vengeance du peuple dépassa les bornes de la justice. Enfin, après de vifs débats, on choisit un homme honorable, Metellus, appartenant à la faction des grands, et on le chargea de la guerre d’Afrique. L’opinion publique, en forçant le sénat de punir la corruption, l’avait emporté sur les mauvaises passions, et « c’était la première fois, dit Salluste, que le peuple mit un frein à l’orgueil tyrannique de la noblesse[2]. »


Marius (647).

V. Les Gracques s’étaient faits, pour ainsi dire, les champions civils de la cause populaire ; Marius en devint le soldat farouche. Né d’une famille obscure, élevé dans les camps, parvenu par son courage aux grades élevés, il avait

  1. Salluste, Jugurtha, xxxi.
  2. Salluste, Jugurtha, v.