Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/237

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Jugurtha à venir s’expliquer à Rome, saisit l’occasion de rappeler les griefs du peuple et la conduite scandaleuse des nobles par les paroles suivantes :

« Après l’assassinat de Tiberius Gracchus, qui, selon les nobles, aspirait à la royauté, le peuple romain se vit en butte à leurs rigoureuses poursuites. De même, après le meurtre de Caius Gracchus et de Marcus Fulvius, combien de gens de votre ordre n’a-t-on pas fait mourir en prison ? À l’une et l’autre époque, ce ne fut pas la loi, mais leur caprice seul qui mit fin aux massacres. Au surplus, j’y consens : rendre au peuple ses droits, c’est aspirer à la royauté, et il faut regarder comme légitime toute vengeance obtenue par le sang des citoyens… Dans ces dernières années, vous gémissiez en secret de voir le trésor public dilapidé, les rois et des peuples libres tributaires de quelques nobles, de ceux-là qui seuls sont en possession des dignités éclatantes et des grandes richesses. Cependant c’était trop peu pour eux de pouvoir impunément commettre de tels attentats : ils ont fini par livrer aux ennemis de l’État vos lois, la dignité de votre empire et tout ce qu’il y a de sacré aux yeux des dieux et des hommes… Mais que sont-ils donc, ceux qui ont envahi la République ? Des scélérats couverts de sang, dévorés d’une monstrueuse cupidité, les plus criminels et en même temps les plus orgueilleux de tous les hommes. Pour eux, la bonne foi, l’honneur, la religion, la vertu, sont, comme le vice, des objets de trafic. Les uns ont fait périr des tribuns du peuple ; les autres vous ont intenté d’injustes procédures ; la plupart ont versé votre sang, et ces excès sont leur sauvegarde : plus ils ont été loin dans le cours de leurs attentats, et plus ils se voient en sûreté… Eh ! pourriez-vous compter sur une réconciliation sincère avec eux ! Ils veulent dominer, vous voulez être libres ; ils veulent opprimer, vous résistez à l’oppression ;