Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/317

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sa ruine prochaine un terme à son influence ; mais César, en dépensant des millions pour amuser la foule, ne faisait pas de cet enthousiasme passager le seul point d’appui de sa popularité ; il l’établissait sur une base plus solide, en réveillant dans le peuple des souvenirs de gloire et de liberté.

Non content d’avoir contribué à plusieurs mesures réparatrices, d’avoir gagné Pompée à ses opinions, et tenté une première fois de faire revivre la mémoire de Marius, il voulut, par une manifestation éclatante, sonder l’opinion publique. Au moment où la splendeur de son édilité produisait sur la foule l’impression la plus favorable, il fit rétablir secrètement les trophées de Marius autrefois renversés par Sylla, et donna l’ordre de les placer pendant la nuit au Capitole[1]. Le lendemain, quand on vit ces images étincelantes d’or, ciselées avec un art infini et ornées d’inscriptions qui rappelaient les victoires remportées sur Jugurtha, sur les Cimbres et sur les Teutons, les grands se mirent à murmurer, blâmant César d’oser ressusciter des emblèmes séditieux et des souvenirs proscrits ; mais les partisans de Marius accoururent en grand nombre au Capitole, faisant retentir ses voûtes sacrées de leurs acclamations. Beaucoup versaient des larmes d’attendrissement en voyant les traits vénérés de leur ancien général, et proclamaient César le digne successeur de ce grand capitaine[2].

Inquiet de ces démonstrations, le sénat s’assembla, et Lutatius Catulus, dont le père avait été une des victimes de Marius, accusa César de vouloir renverser la République, « non plus secrètement par la mine, mais ouvertement, en la battant en brèche[3]. » César repoussa cette attaque, et ses partisans, heureux de ce succès, s’écriaient à l’envi

  1. Suétone, César, xi.
  2. Plutarque, César, vi.
  3. Plutarque, César, vi.