Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/395

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

opposerait par la violence, « Si quelqu’un osait tirer le glaive, s’écria-t-il, moi, je prendrais même le bouclier, » voulant dire par là qu’il viendrait sur la place publique armé comme pour un combat. Cette déclaration hardie de Pompée, appuyée par Crassus et par Cæpion[1], fit taire toutes les oppositions, excepté celle de Bibulus, qui, avec trois tribuns ses partisans, réunit le sénat dans sa maison, où l’on résolut qu’à tout prix il fallait repousser ouvertement la loi[2].

Le jour des comices fixé, le peuple envahit le Forum pendant la nuit. Bibulus accourut avec ses amis au temple de Castor, où son collègue haranguait la multitude ; il essaya en vain de parler, fut précipité du haut des degrés et contraint de s’enfuir, après avoir vu briser ses faisceaux et blesser deux tribuns. Caton, à son tour, tenta d’aborder les rostres ; expulsé par la force, il y revint, mais, au lieu de traiter la question, voyant que personne ne l’écoutait, il attaqua César avec aigreur, jusqu’à ce qu’on l’arrachât une seconde fois de la tribune. Le calme rétabli, la loi fut adoptée. Le lendemain, Bibulus essaya d’en proposer l’abrogation au sénat. Personne ne le soutint, tant l’élan populaire avait subjugué les esprits[3]. Dès ce moment il prit le parti de se renfermer chez lui pendant toute la durée du consulat de César. Quand celui-ci présentait une loi nouvelle les jours de comice, il se contentait de protester et de lui faire dire par ses licteurs qu’il observait le ciel, et qu’ainsi toute délibération était illégale[4]. C’était avouer hautement le but politique de cette formalité.

  1. Suétone, César, xxi.
  2. Appien, Guerres civiles, II, xi.
  3. Dion-Cassius, XXXVIII, vi.
  4. Les consuls, les préteurs, et en général tous ceux qui présidaient une assemblée du peuple, ou même qui s’y trouvaient en qualité de magistrats, avaient un droit de veto fondé sur la superstition populaire. Ce droit s’exerçait en déclarant qu’un phénomène céleste avait été observé par eux, et qu’il