Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 1, Plon 1865.djvu/66

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tant il faut d’années à un pays pour se remettre des secousses et de l’affaiblissement causés par les révolutions, même les plus légitimes.

La société romaine avait été néanmoins assez vigoureusement constituée pour résister à la fois aux attaques du dehors et aux troubles intérieurs. Ni les envahissements de Porsenna, ni ceux des Gaulois, ni la conjuration des peuples voisins, ne purent compromettre son existence. Déjà des hommes éminents, tels que Valerius Publicola, A. Postumius, Coriolan, Spurius Cassius, Cincinnatus, Camille, s’étaient distingués comme législateurs et comme guerriers, et Rome pouvait mettre sur pied dix légions, ou 45 000 hommes. Au dedans, de sérieux avantages avaient été obtenus, de notables concessions faites pour amener la réconciliation entre les deux ordres ; on avait adopté des lois écrites, et mieux défini les attributions des différentes magistratures, mais la constitution de la société restait la même. La facilité accordée aux plébéiens d’arriver à tous les emplois ne fit qu’accroître la force de l’aristocratie ; elle se rajeunit sans se modifier, diminua le nombre de ses adversaires et accrut celui de ses adhérents. Les familles plébéiennes riches et importantes vinrent bientôt se confondre avec les anciennes familles patriciennes, partager leurs idées, leurs intérêts, leurs préjugés même ; aussi un savant historien allemand remarque avec raison qu’après l’abolition de la royauté il y eut peut-être un plus grand nombre de plébéiens dans le sénat, mais que le mérite personnel, sans naissance et sans fortune, éprouva plus de difficultés à parvenir[1].

Il ne suffit pas, en effet, pour apprécier l’état d’une société, d’approfondir ses lois, il faut encore bien constater l’action qu’exercent les mœurs. Les lois proclamaient l’éga-

  1. Mommsen, Histoire romaine, I, p. 241, 2e édit.