Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 2, Plon 1865.djvu/399

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

De plus, il a été question de dix lieutenants pour César : les uns s’opposaient absolument à ce qu’on les accordât, les autres recherchaient les précédents ; ceux-ci remettaient à un autre temps, ceux-là accordaient, sans employer des termes flatteurs. Dans cette circonstance, à la manière dont je parlai, tout le monde comprit que, en m’occupant des intérêts de la République, je faisais encore plus pour honorer César. »

Dans un autre discours, le même orateur s’écrie : « Le sénat a décerné des prières publiques à César dans la forme la plus honorable, et pour un nombre de jours encore sans exemple. Malgré l’épuisement du trésor, il a pourvu à la solde de son armée victorieuse ; il a décidé qu’on donnerait dix lieutenants au général, et que, par dérogation à la loi Sempronia, on ne lui enverrait pas de successeur. C’est moi qui ai ouvert ces avis, qui ai porté la parole ; et, plutôt que d’écouter mon ancien dissentiment avec César, je me suis prêté à ce que réclament, dans les circonstances actuelles, l’intérêt de la République et le besoin de la paix[1]. »

Mais si en public Cicéron s’exprimait avec tant de netteté, dans ses relations privées il ménageait encore l’opinion de ses anciens amis. C’est d’ailleurs la seule manière d’expliquer une contradiction trop choquante, même dans un caractère aussi versatile. En effet, au moment où il se vantait hautement des services qu’il avait contribué à rendre à César, il écrivait à P. Lentulus, son ami, proconsul en Cilicie : « On vient d’accorder à César des subsides et dix lieutenants, et l’on ne tient aucun compte de la loi Sempronia, qui voulait qu’on lui donnât un successeur. Mais, ce sujet est trop triste, et je ne veux pas m’y arrêter[2]. »


  1. Cicéron, Discours pour Balbus, xxvii.
  2. Cicéron, Lettres familières, I, vii.