Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 2, Plon 1865.djvu/409

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consulaires, se succédaient tous les cinq jours. Ce fut à la faveur de cet interrègne que se tinrent les comices. Le résultat était prévu. Outre leur immense clientèle, Pompée et Crassus étaient assurés de l’appui de César, qui, ainsi que nous l’avons dit, avait eu soin d’envoyer en congé, pour voter, un assez grand nombre de légionnaires[1]. Ils arrivaient, conduits par Publius Crassus, fils du triumvir, que ses exploits en Aquitaine avaient rendu célèbre.

Seul candidat de l’année précédente, L. Domitius Ahenobarbus, excité par Caton, son beau-frère, persista dans sa brigue jusqu’au dernier moment. Sorti avant le jour pour les comices, avec M. Caton et beaucoup de ses clients, il fut avec les siens en butte à de violentes attaques. L’esclave qui marchait devant lui une lanterne à la main fut tué, Caton blessé. La frayeur s’empara de Domitius, et il se réfugia dans sa maison. L’interroi présidant les comices proclama sans opposition Crassus et Pompée consuls.

Les arrangements conclus à Lucques avaient donc réussi, et l’ambition des trois personnages éminents qui absorbaient l’attention publique était satisfaite ; mais le but de cette ambition variait selon le caractère de chacun. Crassus ne désirait le commandement d’une armée que pour augmenter sa réputation et ses richesses immenses. Pompée, sans convictions profondes, mettait sa vanité à être considéré comme le premier de la République. César, chef du parti populaire, aspirait au pouvoir, surtout pour faire triompher sa cause. Le moyen qui devait se présenter à son esprit n’était pas de fomenter la guerre civile, mais de se faire nommer plusieurs fois consul : les grands citoyens qui l’avaient précédé n’avaient pas suivi une autre voie, et il y a un entraînement naturel à prendre pour exemple ce qui a réussi dans le passé. La gloire acquise dans les Gaules assurait d’avance

  1. Plutarque, Crassus, xvi. — Dion-Cassius, XXXIX, xxxi.