Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 2, Plon 1865.djvu/414

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Pompée resterait à Rome après son consulat, et qu’il ferait gouverner sa province d’Espagne par ses lieutenants. Le vote fut émis au milieu du plus orageux tumulte. Ateius fut blessé dans la mêlée, qui coûta la vie à quelques citoyens ; c’était chose trop fréquente alors pour produire une grande sensation.

Telle était la mémorable lutte engagée alors à Rome entre les consuls et l’opposition. À ne juger que d’après certaines violences racontées par les historiens, on est tenté d’abord d’accuser Crassus et Pompée de s’être portés à un étrange abus de la force ; mais un examen plus attentif prouve qu’ils y furent, pour ainsi dire, contraints par les menées turbulentes d’une minorité factieuse. En effet, ces mêmes historiens, qui décrivent avec complaisance les moyens de compression coupable employés par les candidats au consulat, laissent ensuite échapper çà et là des assertions contraires, qui viennent détruire l’impression fâcheuse de leur récit. Ainsi, d’après Cicéron, l’opinion publique blâmait la guerre qu’on faisait à Pompée et à Crassus[1]. Plutarque, après avoir présenté sous des couleurs défavorables les manœuvres des consuls pour la distribution des gouvernements des provinces, ajoute : « Ce partage plut à tous les partis. Le peuple désirait que Pompée ne fût pas éloigné de Rome[2]. »

César pouvait espérer que le consulat de Pompée et de Crassus rétablirait l’ordre et l’empire des lois : il n’en fut

    par Suétone, Plutarque et Appien. Il oublie que Trebonius, créature de César, fut un de ses lieutenants les plus dévoués pendant la guerre civile. Nous pensons que le témoignage des autres historiens doit être préféré.

  1. « À mon avis, ce que ses adversaires auraient de mieux à faire, ce serait de cesser une lutte qu’ils ne sont pas de force à soutenir… Aujourd’hui la seule ambition qu’on puisse avoir, c’est d’être tranquille, et ceux qui gouvernent seraient disposés à nous le permettre, s’ils trouvaient certaines gens moins roidis contre leur domination. » (Cicéron, Lettres familières, I, viii, lettre à Lentulus.)
  2. Plutarque, Crassus, xix.