Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 2, Plon 1865.djvu/498

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payer les voyageurs selon le nombre et la nature de leurs moyens de transport, en un mot, établir un impôt sur les riches et accroître ainsi sa popularité[1]. Ces deux derniers projets furent aussi mal reçus que le premier, et ce double échec acheva de le rapprocher de ceux qu’il avait jusque-là combattus.

La nomination des censeurs, qui eut lieu à cette époque, amena de nouvelles complications. L’un, L. Calpurnius Pison, beau-père de César, n’accepta ces fonctions qu’à regret et montra une extrême indulgence ; l’autre, Appius Claudius Pulcher, qui avait été consul en 700, fougueux partisan de la noblesse, crut la servir en déployant une sévérité excessive. Il renvoya du sénat tous les affranchis et plusieurs nobles des plus illustres, entre autres l’historien Salluste, homme d’esprit et de talent, qui se rendit aussitôt dans la Cisalpine, où César l’accueillit avec empressement[2].

Appius n’avait aucune mesure dans sa dureté. Cicéron dit de lui que, pour ôter de simples taches, il s’ouvrait les veines et les entrailles[3]. Au lieu de remédier au mal, il ne fit donc que l’envenimer ; il jeta dans les rangs du parti opposé tous ceux qu’il excluait, sans donner à ceux qu’il maintenait une plus grande considération. Il y a des temps où la sévérité est mauvaise conseillère et ne peut rendre à un gouvernement la force morale qu’il a perdue.


  1. La lettre suivante explique la nature de cet impôt : « Cet homme d’importance (P. Vedius) est venu au-devant de moi avec deux chariots, une chaise roulante, une litière et un si grand nombre de valets, que, si la loi de Curion passe, Vedius sera assurément taxé de cent mille sesterces. Il avait de plus un cynocéphale sur un de ses chariots, et des ânes sauvages dans son équipage. Je n’ai jamais vu un homme si ridicule. » (Cicéron, Lettres à Atticus, VI, i, 22.)
  2. Dion-Cassius, XL, lxiii.
  3. Cicéron, Lettres familières, VIII, xiv.