Aller au contenu

Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 2, Plon 1865.djvu/521

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cèdent ; mais on ne s’arrête pas à leur opposition. Le sénat se réunit en habits de deuil, résolu d’avance à toutes les mesures de rigueur. Les tribuns, de leur côté, annoncent qu’ils feront usage de leur droit de veto. Au milieu de cette excitation générale, leur opiniâtreté n’est plus considérée comme un droit de leur charge, mais comme une preuve de complicité ; et d’abord on met en délibération les mesures à prendre contre leur opposition. Marc-Antoine est le plus audacieux ; le consul Lentulus l’interpelle avec colère, et lui enjoint de quitter la curie, « où, dit-il, son caractère sacré ne le préservera pas plus longtemps du châtiment que lui mérite sa conduite hostile à la République. » Alors Marc-Antoine, se levant impétueusement, prend les dieux à témoin qu’on viole en sa personne les privilèges de la puissance tribunitienne. « On nous outrage, s’écrie-t-il, on nous traite comme des meurtriers. Vous voulez des proscriptions, des massacres, des incendies. Que tous ces maux que vous vous êtes attirés retombent sur vos têtes ! » Puis, prononçant les formules d’exécration, qui avaient toujours le pouvoir de frapper les esprits superstitieux, il quitte la curie, suivi de Q. Cassius, de Curion et de M. Cœlius[1]. Il était temps : la curie allait être cernée par un détachement de troupes qui déjà s’avançait[2]. Ils sortirent tous les quatre de Rome dans la nuit du 6 au 7 janvier, sous des habits d’esclaves, dans un chariot ordinaire, et gagnèrent les quartiers de César[3].

Les jours suivants le sénat se réunit hors de la ville. Pompée y répète ce qu’il a fait dire par Scipion. Il applaudit au courage et à la fermeté de l’assemblée ; il énumère ses forces, se vante d’avoir dix légions, dont six en Espagne et

  1. Cicéron, Lettres familières, XVI, ii ; — Philippiques, II, xxi, xxii.
  2. Plutarque, Antoine, vii. — Dion-Cassius, XLI, ii, iii.
  3. Plutarque, Antoine, vii. — Appien, Guerres civiles, II, xxxiii.