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Page:Louis Napoléon Bonaparte - Histoire de Jules César, tome 2, Plon 1865.djvu/70

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avait été nécessaire aux Helvètes pour négocier les conditions de leur passage chez les Séquanes, se transporter du Rhône à la Saône et commencer à traverser cette rivière. Ils avaient franchi le Pas-de-l’Écluse, longé la rive droite du Rhône jusqu’à Culoz, tourné ensuite à l’est par Virieu-le-Grand, Tenay et Saint-Rambert, et, traversant, à partir de là, les plaines d’Ambérieux, la rivière de l’Ain et le vaste plateau des Dombes, ils étaient parvenus à la Saône, dont ils occupaient la rive gauche, depuis Trévoux jusqu’à Villefranche. (Voir planche 4.) La lenteur de leur marche ne doit pas surprendre, si l’on considère qu’une agglomération de trois cent soixante-huit mille individus, hommes, femmes et enfants, traînant après eux huit à neuf mille chariots, par un défilé où les voitures ne pouvaient passer qu’une à une, dut employer plusieurs semaines à le franchir[1]. César calcula sans doute à l’avance, assez exacte-

  1. Pour évaluer le volume et le poids que représente, un approvisionnement de trois mois de vivres, pour trois cent soixante-huit mille personnes des deux sexes et de tout âge, admettons que la ration de vivres était faible et ne constituait pour ainsi dire qu’une réserve en farine trium mensium molita cibaria, en moyenne de 3/4 de livre (3/4 de livre de farine donnent environ une livre de pain) ; à ce compte, les Helvètes auraient emporté 24 840 000 livres, soit 12 420 000 kilogrammes de farine. Admettons aussi qu’ils eussent de grandes voitures à quatre roues, pouvant porter 2 000 kilogrammes et traînées par quatre chevaux. Les 100 kilogrammes de farine brute cubent 2 hectolitres ; 2 000 kilogrammes de farine cubent donc 4 mètres ; ce qui conduit à ne pas supposer plus de 4 mètres cubes de charge moyenne par voiture à quatre chevaux. Sur nos bonnes routes de France, tracées en plaine et pavées, trois chevaux suffisent pour traîner au pas, pendant dix heures, une voiture à quatre roues portant 4 000 kilogrammes. C’est plus de 1 300 kilogrammes de charge par collier.

    Nous supposons que les chevaux des émigrants ne traînaient que 500 kilogrammes en outre du poids mort, ce qui donnerait environ 6 000 voitures et 24 000 bêtes de trait pour transporter les trois mois de vivres.

    Mais ces émigrants n’étaient pas seulement pourvus de vivres, ils avaient certainement encore des bagages. Il ne nous paraît pas exagéré de penser que chaque individu emportait, en sus de ses vivres, 15 kilogrammes de bagage