Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/260

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pas honte de boire avec ce truand-là ! se mit-elle à hurler en désignant le Pape qui, une main dans l’entournure de son gilet, se préparait justement à entamer les négociations.

Furieux de cette intervention qui réduisait à néant ou tout au moins entravait fort ses projets, il bondit comme un taureau qu’on pique et, les poings serrés, la mâchoire avancée, les yeux flamboyants, riposta :

— De quoi, sale bavarde, vieille garce, tu viens encore m’insulter chez moi, attends un peu nom de D… !

Et saisissant un fouet qui traînait dans un coin il s’élança vers l’intruse le bras rejeté en arrière pour la cingler de toutes ses forces.

Mais l’autre, qui savait à quelle catégorie de mâle elle avait affaire et comme Panurge craignait les coups, ne s’attarda pas à discuter ; néanmoins tout en filant précipitamment, elle trouva le temps de jeter à son époux cette phrase qui n’était pas, en l’occurrence, une vaine menace :

— Attends un peu, grand soulaud, tu n’as pas fini quand tu rentreras !

— Tu viens de voir et d’entendre, fit constater le Pape au Carcan, quelle sale langue c’est que ta femme ; elle ferait se battre deux bornes ; nous étions là, bien tranquilles et tout prêts à nous accorder, réglant la chose en hommes, en gens sérieux, quand il a fallu que cette « chameau »-là