Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/59

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Sur les bords du Doubs, dans le sentier qui longe les vignes d’abord et le bois ensuite, l’herbe tendre, l’ombre fraîche, l’eau limpide, le silence, la solitude, et je pense « quelque diable aussi les poussant »… C’était là, oui là, sous ces ombrages propices au doux repos et aux austères méditations que tous les jours, tous les matins, de dix heures à midi, les couples revenant du marché s’arrêtaient et faisaient des stations, des stations… trop longues pour être honnêtes.

Le curé de Melotte réfléchit à tout cela : il y songea le long des jours et pendant ses veilles et durant ses nuits blanches.

La Pentecôte approchait : c’était le moment de profiter. Les hommes viendraient en grand nombre à l’office ce jour-là, d’autant qu’il saurait leur mettre l’eau à la bouche : « Venez à la messe, ne manquez pas mon prône surtout, j’ai quelque chose de très sérieux, de très intéressant, de très grave à vous apprendre ; venez, vous verrez que vous ne vous en repentirez pas. »

Ainsi, c’était décidé ; ce jour-là il frapperait le grand coup ; il leur dirait leur fait à tous, aux coupables comme aux parents qui ne l’étaient pas moins ; il mettrait le doigt sur la plaie, les points sur les i, afin qu’on sût bien de quoi il s’agissait et que les responsabilités fussent bien fixées.

Pourtant la chose en soi était grave ; ce n’est pas tout que de dire : vos filles sont des déver-