Page:Louis d Elmont Hallucinations amoureuses 1924.djvu/4

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— Pourquoi tout à l’heure ?… interrogea le peintre.

— Voyons, mon petit Albert, ne sois pas impatient ! Tu ne vas pas me faire une scène, je pense.

« Venez tout de suite, mignon, embrasser votre petite Iette !…

Nul ne résiste à une invite aussi gentiment faite et Albert s’empressa de déposer un long baiser sur les jolies lèvres de « sa petite Iette «.

Bientôt, ils étaient couchés côte à côte dans le lit de l’artiste et rattrapaient, comme l’on pense, le temps perdu.

Après les premières étreintes, Juliette jugea le moment venu de s’expliquer.

— Voilà, dit-elle, je vais te dire pourquoi je suis arrivée en retard. Seulement il faut me jurer d’être bien raisonnable.

— En voilà un préambule ! Tu m’effraies !

— C’est précisément ce que je ne veux pas ; tu dois entendre ce que j’ai à te dire posément, et accepter ce que je me suis résolue moi-même à ne pas refuser.

— Tu parles avec énigmes…

— Prépare-toi à recevoir un grand coup !… Je vais me marier…

— Par exemple ! Tu te maries … avec un autre ?

— Hélas !… J’y suis obligée !

— Mais je ne veux pas, moi… Je ne veux pas te perdre.

— Tu es bête. Tu ne me perdras pas pour cela. Tu resteras mon amant quand même.

— Et pourquoi te maries-tu donc ?

— Pour ma famille.

— Je m’en moque de ta famille.

Juliette poussa un profond soupir.

— Écoute. Je suis contrainte absolument d’épouser le fiancé que me présentent mes parents. La situation de mon père en dépend.

— La situation de ton père ? Quel est donc ce fiancé qu’on t’impose ?

M. Prosper Benoît, le directeur du ministère où mon père est employé.

— Et pourquoi es-tu obligée de l’épouser ?

— Parce que, si je ne me marie pas avec lui, mon père n’aura plus jamais d’avancement.

— Ça n’est pas un grand malheur.

— Pauvre papa, qui attend depuis dix ans sa nomination de sous-chef de bureau et les palmes académiques…

— S’il a attendu dix ans, il attendra encore.

— Ce ne sera plus la même chose. Jusqu’à présent il attendait avec espoir… mais, si je refuse la main du direc-