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de manoirs, de donjons, tout à la fois demeures d’une famille seigneuriale et places de guerre, la Renaissance, qui laissa sur les bords de la Loire de si beaux spécimens de sa brillante architecture, passa insouciante à côté des châteaux-forts des bords de l’Isère qui tombaient criblés de blessures, et n’en construisit pas d’autres. Vers la fin du XVIIe siècle seulement, quelques grands seigneurs qui avaient vu Versailles et qui trouvaient par comparaison leur domaine patrimonial bien farouche, imaginèrent de transformer à la mode du jour leurs donjons antiques, et tracèrent des parcs là où avaient été les fossés et les remparts. On en vit qui, ne pouvant venir à bout d’une masse de maçonnerie vraiment effrayante par son développement et son épaisseur, traitèrent leurs vieilles murailles comme simple roche et taillèrent dans le castel féodal découronné de nouvelles et plus confortables demeures, régularisant les façades, détruisant les croisées à meneaux, pour leur substituer de hautes fenêtres à balcon.

Ils sont rares aujourd’hui les châteaux qui nous sont arrivés directement du moyen-âge sans avoir subi cette restauration dangereuse, demandée par le faste et réprouvée par l’art. Ils sont si rares qu’on peut les compter et qu’il serait presque du devoir d’un chroniqueur dauphinois de les décrire.

Mais c’est là œuvre d’ouvrier entendu, et je la laisse à plus habile.

Ce que j’entends faire, c’est dire les aventures extraordinaires dont l’un de ces précieux débris fut le témoin pendant la seconde moitié du siècle dernier. Ce récit, qui ne demande point de science, me revient de droit.