Page:Louise drevet - Dauphiné bon coeur, 1876.djvu/74

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 68 —

l’on soupait encore en ce temps-là. Le manufacturier, sa femme et ses fils s’absorbèrent dans leurs occupations journalières. Vers le soir seulement, ils s’accordèrent un peu de répit. Ce fut pour répondre à l’invitation du marquis, qui les faisait prier de passer chez lui, avec Mademoiselle Yolande, si cela plaisait à celle-ci.

Mademoiselle Yolande n’eut garde de refuser. Elle s’ennuyait trop, d’une part ; de l’autre, elle était trop désireuse de revoir, même n’étant plus seule, l’appartement où se passaient, à l’insu du manufacturier, des choses si curieuses. Elle fit donc un peu de toilette, autant que le comportait son deuil, et attendit que Madame Isabeau vînt la prendre. Pour passer le temps, elle regarda par la fenêtre. Quelle fut sa surprise de voir la façade du château s’illuminer et resplendir peu à peu comme la veille ! comme la veille, le grand salon se peupler de sa société brillante ; comme la veille, l’orchestre, prendre place sur l’estrade ; comme la veille aussi, le beau jeune homme, le fils du marquis Jacques, vêtu de son même habit de velours rose, s’accouder à la cheminée et prêter l’oreille, non certainement aux causeries de ses voisins, mais à la suave mélodie jouée par le flûteur.

Enfin ! il allait y avoir du nouveau ! Enfin, elle allait connaître le monde ! Toutes les bizarreries du marquis Jacques furent oubliées. La nuit précédente, elle avait d’abord vu des choses vraies ; puis, sur cette vision de choses vraies, elle avait fait un rêve… Elle s’en voulait maintenant d’en avoir voulu au marquis Jacques sur la foi d’un rêve.

— Allons, venez-vous, gentille demoiselle ? dit