Page:Lourié - La Philosophie de Tolstoï.djvu/185

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Tolstoï n’est ni un partisan de la destruction universelle, ni un prophète de l’anarchie par le fait ; il ne prêche pas l’ascétisme ; il n’est, comme Bouddha, ni l’apôtre, ni le dévot, ni même le théoricien du fatalisme. Son non-agir ne veut pas dire indifférence ; il n’a rien de commun avec le pessimisme résigné de l’Inde, ce n’est pas le Nirvana, ce gouffre de l’éternel néant, qu’il propose, c’est l’action individuelle sur soi-même pour devenir un Être parfait ; c’est l’aspiration à l’abolition des misères humaines, l’aspiration vers le Bien, vers le bonheur Universel. Au lieu de « Lutte pour la vie » de Darwin, Tolstoï met comme base de la société l’ « Aimez-vous les uns les autres » de Moïse et de Jésus.

La théorie de Tolstoï est très simple : la vie est belle, la vie est bonne ; ce sont les hommes qui l’ont rendue âpre. Le bonheur existe. Ce ne sont point les signes extérieurs de la vie, mais la vie intérieure, consciente de l’homme qui donne le bonheur.

« Travaillez, n’exploitez personne, ne tuez pas, aimez, et vous connaîtrez le bonheur. Purifiez votre vie, purifiez votre conscience et vous connaîtrez le bonheur. »

Il semble qu’il n’y ait rien d’importun, rien d’impossible dans ces raisonnements abstraits. On objecte : Oui, c’est bien possible, mais à condition que tout le monde le fasse.

Il faut pourtant que quelqu’un commence ! Que chacun fasse son examen de conscience, que chacun tâche de réaliser autour de lui un peu de bien, ou au moins de ne pas faire du mal dans sa vie, et chacun connaîtra le bonheur que procure la tranquillité de